OH NUIT (Barranquilla 1906)

Mon mal est d’aller à l’aveuglette avec l’âme enflammée,
aveugle sans cicérone sous le bleu de janvier;
ma peine, être tout seul errant dans le sentier;
et le pire de mes maux, ne pas comprendre la vie.

Mon mal est d’aller à l’aveuglette, tout seul avec mon histoire,
me trouver ici sentant la lumière qui me torture
et que ce cœur est braise transitoire
qui brûle dans la nuit pure.

Et venir, sans le savoir, peut-être d’un orientque
l’âme en sa cécité voit comme un mirage,
et dans l’anxiété du sommet que dore un soleil éclatant
d’aller d’un pas fatal vers le fatal abîme.

Malgré tout, il aurait été peut-être un noble engagement d’exalter mon esprit sous l’après midi enflammée comme un parfum saint…
Mais si le cœur est braise transitoire!
Et toutefois, je sent comme une perpétuelle ardeur que dans le combat stérile ma jeunesse immole…
(Oh nuit du chemin, vaste et seule, au milieu de la mort et de l’amour!)